9 : Petit effronté
Aujourd'hui, je ne vois
plus Théo. Ni en privé, ni en public. Il est parti dans un autre lycée,
mais on était séparé avant ; depuis les vacances de Pâques. Ce n'est pas
moi qui suis parti. Ce n'est pas lui non plus : il m'a juste jeté.
C'est le mot qui convient. Après un an et demi ensemble ! Je ne
l'intéressais plus. Il y avait bien un moyen pour l'intéresser
encore, mais je n'ai pas voulu. En fait, il voulait faire TOUT ce qui se
fait, quand on est en couple... et qu'on est adulte. Sauf qu'on est pas
des adultes ! et qu'on a le droit de prendre son temps, de pas
précipiter ce qui doit venir naturellement, quand on se sentira prêt, et
surtout ne pas considérer l'autre comme de la « viande à plaisir ».
L'expression (si gracieuse et délicate) n'est pas de moi, mais de lui.
Il l'avait sortie devant moi, en parlant d'un mec trainant dans la cour :
« Lui, c'est un put1 de beau morceau de viande à plaisir ! » J'avais
rien dit. J'étais choqué. Choqué par l'expression et qu'il s'excite sans
vergogne sur un autre. En plus, je le connaissais, cet autre. Il était
une classe en dessous et gay. Comment je l'ai su ? C'est lui qui me l'a
dit. Peu avant, il était venu me voir :
— Askip, t'es avec un mec ?
— Qu'est-ce que ça peut te faire ?
— Théo Vallon, c'est ça ?
— Et alors ?
— Non mais t'inquiète : je juge pas ! je m'intéresse...
— Tu t'intéresses à quoi ? à lui ? et tu viens me voir ?
— Ben non, si je viens te voir, c'est que c'est à TOI que je m'intéresse.
— Ah ok. Et ben, t'es direct au moins toi comme mec...
— C'est que ça fait un moment que je t'ai dans le viseur.
— Ah bon ? Première nouvelle...
— Oui, je sais bien que tu m'as jamais calculé.
— Je te connais pas, moi.
— Moi si. T'es Octave de K... et j'aimerai être ton ami.
— Mon ami ? Ben peut-être, je sais pas. Pourquoi pas ? Faut voir.
— Non mais je veux dire : ton petit ami.
— Ah ouais... Euh, oui, mais non. Désolé. T'es mignon et tout, mais c'est bon, j'ai déjà ce qu'il me faut.
— Franchement, tu mérites mieux que ce déglingos.
— C'est moi que ça regarde.
— Comme tu veux.
J'insiste pas. Maintenant que tu sais que je suis là, que j'ai envie
d'être avec toi, c'est clair que tu vas y réfléchir, que tu le veuilles
ou non. Et moi, c'est tout ce que je veux. Alors, penses-y bien...
Bref, c'était quand même
gonflé de sa part ! Je savais même pas comment il s'appelait, ni
précisément en quelle classe il était. Non mais qu'est-ce qu'il croyait
avec son : « Tu vas penser à moi, que tu le veuilles ou non. » Pff, je
sais pas quel film il se faisait, mais, en fait, il faut que je te dise :
ce p'tit con, il avait raison.
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